Récréation : Contes et Poésies...
• Gazette N°8 - 20 février 2002
   - Petit conte du vieux chêne

• Gazette N°19 - 14 septembre 2003
   - Gazouillis...

• Gazette N°22 - 24 décembre 2003
   - Le distributeur de La Gazette

• Gazette N°26 - 11 juillet 2004
   - Conte

• Gazette N°30 - 20 avril 2005
   - Primevère

• Gazette N°46 - 5 juin 2007
   - Coquinerie
   - Gros mot odorant

• Gazette N°47 - 16 juillet 2007
   - Deux poèmes de Jean Tardieu

• Gazette N°49 - 25 septembre 2007
   - Le tilleul villadéen de trois cents ans

• Gazette N°52 - 15 février 2008
   - Écoute le vent
   - Petite histoire vécue

• Gazette N°72 - 29 septembre 2011
   - Découverte de la vendange

Gazette N°8 - 20 février 2002

Petit conte du vieux chêne

Marie Henriette et Eric Quettier nous ont envoyé ce conte accompagné de ce petit mot : Nous sommes "tombés en amour" comme disent les Canadiens, devant ce petit coin de paradou que sont la région et le village de Villedieu. La clarté, lumineuse, la chaleur, intense, le calme, ponctué par les cigales, et le vieux chêne du quartier Saint Laurent sont source d'inspiration. Voici, pour vous, un petit conte d'une "estrangère”. J'espère qu'il vous plaira.

Nous avons demandé à Julien Moinault d’illustrer ce conte et il nous a fait deux croquis. Les familiers de Saint Laurent reconnaîtront la maison et peut-être le chêne dont il est question : il s’agit de la "maison de Sarah" pour les vieux Villadéens, rebaptisée "maison de Mayaric" par les nouveaux propriétaires.


Pour Zoé en vacances...

Au-delà des vignes s’étendait le paysage.
Les collines, arrondissant leur dos pour recevoir toutes les gouttes de soleil, s’étalaient, langoureuses. Les chemins étaient battus par des générations de paysans qui avaient aimé ce sol où poussaient, en rangs disciplinés et dociles, les fruits de la terre. Les arbres, mûris par les abricots, se taillent depuis toujours en mains ouvertes, accueillantes et généreuses.

Au-delà du paysage s’étendaient encore les vignes.
L’azur s’y marie au soleil pour donner ces rubis gorgés des entrailles de la terre ; chaque caillou est une opaline sortie des profondeurs pour chauffer les pieds des vieilles vignes qui donnent alors le meilleur d’elles-mêmes.

Le porche ouvert laissait entrer le paysage. C’était une ouverture dans le ciel qu’on faisait tôt le matin, pour découvrir, à chaque fois, ce même émerveillement : le village au loin, avec sa tour carrée et crénelée, les quelques maisons vieilles accroupies dans un cercle de ragots et de légendes. On savait que là, sur la place, près de la fontaine et des platanes, les siècles avaient bavardé et fait la causette. Y résonnent encore les siestes feintes où l’on surveille du coin de l’œil les allées, les venues, et où se discutent les entrelacs et les disputes de tout ce petit monde qui a ses racines dans la terre de ses aïeux.

Zoé, elle, venait d’ailleurs. Elle était belle comme un cadeau. Avec ses joues rosies et ses yeux en amande, elle découvrait avec bonheur, partant à l’aventure dans le cœur des gens et des choses. On ne pouvait pas lui résister. Fine comme une souricette, elle parvenait à se faufiler même dans les âmes les plus fermées. Elle y laissait alors sa trace, comme un rayon de soleil.

Le porche était ouvert : le paysage y entra.
Ce fut pour elle un éblouissement. La nature entière se mit à sa taille, elle put ainsi apprendre les vignes et chanter les cigales. Même la fourmi, si peu encline à ouvrir sa porte aux autres, se laissa charmer par Zoé qui discuta avec elle de la bise et du temps chaud.

Seul, le vieil arbre se découpa sur le ciel, au loin, solitaire.
Zoé s’étonna. Pourquoi était-il tout seul ? Pourquoi n’était-il pas entré avec les autres ? Pourquoi différait-il tellement ? Il était vieux, majestueux, étalait ses branches en rameaux multiples. Serait-il orgueilleux ?

Zoé petite curieuse voulait savoir.
- Dis, comment t’appelles-tu ? lui demanda-t-elle de loin.
- ...
- Ho, hé, comment tu t’appelles ? cria-t-elle plus fort.
- ...
Elle s’approcha de l’arbre. Il était immense, mais ne faisait aucune ombre.
Le vieux n’avait plus ses feuilles.
- Je comprends, lui dit-elle, tu n’entends plus ! Elle s’assit sur une racine et réfléchit.

Comment pouvait-on communiquer avec un arbre qui n’entend pas la brise dans ses feuilles, qui ne sent plus la rosée du matin, qui ne capte plus le soleil, qui ne change pas ses couleurs à l’automne, qui n’a plus son épais feuillage pour se protéger et protéger les autres ?

Il était là, dans le paysage, comme un arbre mort, alors que tous les autres autour de lui bruissaient de mille chahuts. En hiver, oui, ils étaient comme lui, mais ils dormaient dans le sommeil engourdi de la nature et se refaisaient une santé. Tandis que lui, c’était toute l’année qu’il était ainsi. Dur de la feuille, disaient les uns ; bois mort, disaient les autres qui voulaient l’envoyer au bûcher.

Zoé le trouvait beau cependant, et surtout unique dans ce paysage luxuriant.

Elle essaya encore de lui parler. C’est vrai qu’il n’entendait plus, mais il devait en avoir des choses à dire !
Il était si vieux.

Zoé en fit son arbre confident. Elle prit l’habitude, chaque jour, dès qu’on ouvrait le porche, de le rejoindre pour lui raconter ses rêves et ses secrets : ils resteraient secrets avec lui.
Fine comme une souricette, elle se fit un petit nid au creux de ses branches et pouvait passer des heures à regarder le ciel, à écouter les cigales.

Le vieil arbre se laissa apprivoiser tout en douceur.
D’abord, il n’osa pas en croire tous ses yeux, ne bougea pas de peur de voir son rêve s’évanouir : Zoé, belle comme un cadeau, l’avait choisi lui ! Il se laissa enchanter par le gazouillis de la fillette, creusa davantage ses branches, se cambra, se laissa recouvrir d’une belle mousse verte toute douillette.

Puis, un jour, de sa voix profonde qui venait de son cœur, sans la brusquer, il lui raconta son histoire. Zoé n’en fut pas troublée, elle savait qu’elle le toucherait et qu’il finirait par craquer et se raconter. Il était vieux, il en avait vu des choses dans ses deux siècles d’existence.

Il lui raconta les gens et les saisons, la chaleur et l’incandescence de l’été, les folies de mistral, et le gros orage qui avait fait tant de dégâts.
Il lui parla de légendes anciennes, de traditions, de superstitions.
Il évoqua la construction de la chapelle des vignes, les processions et tous les serments qui s’y étaient faits et dont il était témoin.
Il lui fit reconnaître les effluves dans le vent chaud, ceux citronnés du thym sauvage, suaves de l’abricot orangé, subtils de l’acacia en fleurs butiné par les abeilles ; ceux des vignes dorées par l’automne et gorgées du soleil d’été, ceux colorés de lavande.
Il évoqua aussi avec nostalgie ses souvenirs de canicule et d’ombre, le temps de sa splendeur, et son feuillage si dense même au plus fort des étés.

Depuis, Zoé a grandi.
Chaque année elle est revenue auprès de son vieux chêne. On ne l’a pas coupé et il lui raconte toujours autant d’histoires. Même plus, car les enfants du village y ont fait leur cabane, leurs rendez-vous de pirates, leur refuge de petites canailles, leur abri de chagrins.

Le vieux centenaire bruit à présent de jeux d’enfants, de rires et d’amusements.
Le porche est toujours ouvert, l’arbre s’y dresse, fier et majestueux.

Heureux, il revit.



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Croquis réalisés par
Julien Moinault







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Gazette N°19 - 14 septembre 2003

Gazouillis

C’est une claire fontaine, qui chante nuit et jour les cigales et le soleil, réconfortante, apaisante.
Eau de vie dans la torpeur de l’été.
Eau de roche, rafraîchie dans l’ombre de la terre, elle court, généreuse et discrète,
à travers bois et futaies, désaltérant à son passage secret les pieds des vignes et des oliviers.
Eau douce, blanche et pure, elle se rassemble en fontaines, de place en place, à l’ombre des platanes.
C’est là, au milieu des villages, qu’elle se mélange au pastis, qu’elle se mêle aux conversations publiques et aux rires ensoleillés.
C’est là, près des cercles de tables qu’elle entend les potins, amusée.
Une fontaine est bruyante de ces histoires qu’elle colporte au fil de l’eau, à fleur de transparence.
C’est là, autour de ces jets, que s’éclabousse en cascade la mémoire des générations, toujours recommencées.

Gazouillis…


Maya Quettier


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Gazette N°22 - 24 décembre 2003

Le distributeur de La Gazette

Cette sombre clarté qui tombe des étoiles
permet d'y voir assez pour livrer le journal
car sachez qu'ils sont là, chacun à sa fenêtre
attendant, impatients, d'ouvrir la boîte aux lettres
et lire avidement les brèves, les nouvelles,
les articles de fond, l’histoire des poubelles,
découvrir le gagnant de la soupe aux bolets
ou celui très brillant du tir au pistolet,
la recette du pistou, les très anciens métiers,
les dates du loto et le vin de l'année.

Toutes ces pages enfin, et c'est là notre vœu,
font découvrir le monde aux gens de Villedieu.

Dites-moi je vous prie, de quoi parlez-vous donc
quelle est cette revue et quel en est le nom ?

Comment vous ne savez ? mon Dieu, mais est-ce bête
ce célèbre journal, Monsieur, c'est LA GAZETTE.

Le distributeur de La Gazette


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Gazette N°26 - 11 juillet 2004

Conte

Sur une bague d'argent, j'ai ce conte d'enfant.

Au bord d'une rivière
un peintre est installé
son chevalet posé.

A ses pieds est tombée
une huppe blessée.

Sitôt il la ramasse,
la caresse et l'embrasse
et soigne vite son aile,
tu seras bien plus belle.

Bientôt il la dessine
et que devient-elle, devine ?

Elle s'envole…

Une légende de ces vers
est née en Angleterre.

Colette Percheron


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Gazette N°30 - 20 avril 2005

Primevère (par Colette Percheron)  par 0,1°C

Au loto du 24 février
Au club des aînés
Pendant le goûter
Même les perdants ont gagné
Une primevère colorée
Que Madame Ode Arlette avait apportée.

Qu’elle en soit remerciée.

Tout s’est très bien passé ;
Malgré quelques absents très regrettés.


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Gazette N°46 - 5 juin 2007

Coquinerie [ par Paule Gillet ]

Tout le monde connaît les fables de Jean de la Fontaine, célèbre poète du XVIIe siècle.

Mais savez-vous qu'il est aussi l'auteur d'un grand nombre de contes que je qualifierais de « coquins » ?

En ces temps de mai où les amoureux désirent convoler en justes noces1, je vous propose la lecture de ce petit conte :

Colin

Colin, faisant préparer sa Maison
Pour recevoir son Epousée,
Trouva sa Servante Alison,
Au plaisir de l'Amour fortement disposée.
Sans perdre le temps à songer,
Il se servit de l'heure du Berger,
Et commençoit l'amoureux badinage.
Quand sa mere, arrivant, le surprit sur le fait,
Et lui dit : « Insolent ! Ce soir, à ton souhait,
N'auras-tu pas un joli pucelage ?
Colin sans s'étonner dit « Mere, tout beau !
Ne vous mettez pas en colére…
Je ne gâte point le mistére :
J'aiguise seulement pour ce soir mon couteau. »


Ce texte original de Monsieur de la Fontaine, est écrit dans l'orthographe de l'époque.

Le livre du bibliophile, Georges Briffaut, Editeur. Paris.
Illustrations de Paul-Émile Bécat.
Année de parution : 15 février 1929.


1. Notre ami Jacques Sals, ancien Buissonnais, actuel Saint-Marcellien et de surcroît, lecteur de La Gazette, a eu justement l'idée de « s'épousailler » avec Marie Bellanger, estrangère de Mérindol-les-Oliviers, le 19 mai de cette année. Il s'y retrouvera peut-être… Quoi qu'il en soit, hommage leur est rendu…







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Gros mot odorant [ par Bernadette Croon ]

Les premiers mots que l'on apprend dans une langue étrangère sont souvent des gros mots... À ce propos, connaissez-vous l'origine du mot anglais « Shit » que nous aurons la décence de ne pas traduire ici ?
Un peu d'histoire...
Au XVIe et XVIIe siècle le fumier était un commerce. Il fallait donc le transporter par tous les moyens et entre autre, le bateau.
Pour que le poids ne soit pas trop excessif, on le séchait. Une fois stocké dans le bateau il fallait faire attention que ce fumier ne prenne pas l'eau, parce qu'en milieu humide, il dégage du gaz méthane qui s'enflamme à la moindre étincelle. Certains bateaux en ont fait la triste expérience.
Pour éviter cet inconvénient le fumier devait être stocké en hauteur... Ce qui se dit en anglais : « Stock hight in transport ».
Remercions monsieur Roman Tomzak pour cette information linguistique.


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Gazette N°47 - 16 juillet 2007

Deux poèmes de Jean Tardieu

Le tombeau de Monsieur Monsieur

Dans un silence épais
Monsieur et Monsieur parlent
c'est comme si Personne
et Rien dialoguait.

L'un dit : Quand vient la mort
pour chacun d'entre nous
c'est comme si personne
n'avait jamais été.
Aussitôt disparu
qui vous dit que je fus ?

Monsieur, répond Monsieur,
plus loin que vous j'irai :
aujourd'hui ou jamais
je ne sais si j'étais.
Le temps marche si vite
qu'au moment où je parle
(indicatif-présent)
je ne suis déjà plus
ce que j'étais avant.
Si je parle au passé
ce n'est pas même assez
il faudrait je le sens
l'indicatif-néant.

C'est vrai, reprend Monsieur,
sur ce mode inconnu
je conterai ma vie
notre vie à tous deux :
A nous les souvenirs !
Nous ne sommes pas nés
nous n'avons pas grandi
nous n'avons pas rêvé
nous n'avons pas dormi
nous n'avons pas mangé
nous n'avons pas aimé.

Nous ne sommes personne
et rien n'est arrivé.



La môme néant

Quoi qu'a dit ? - A dit rin.
Quoi qu'a fait ? - A fait rin.
A quoi qu'a pense ? - A pense à rin.

Pourquoi qu'a dit rin ?
Pourquoi qu'a fait rin ?
Pourquoi qu'a pense à rin ?

A' xiste pas.


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Gazette N°49 - 25 septembre 2007

Le tilleul villadéen de trois cents ans [ par Olivier « Serpent » Vivancos ]

Que cette aire de jeu est belle
Elle nous donne envie
Toutes comme des passerelles
Les branches s’étirent à l’infini

Que cette aire de jeu me plait
Tant de verts différents
La lumière et le bleu cachés
Spectacle fascinant

Que cette aire de jeu m’interpelle
Les racines sous moi s’accrochaient
Me donnent l’impression frêle
D’avoir un arbre sous mes pieds

Que cette aire de jeu est mystique
Un fort tronc au milieu
Ressemble à l’axe artistique
D’un diabolo ingénieux

Que cette aire de jeu est créatrice
De bonheur, de chaleur, de papier
L’encre de chine y glisse
Pour quelques vers, une pensée.

Que cette aire de jeu m’excite
Quand tu y apparais
Dans ta bouche un song en ite
Résonne parfois quand tu viens m’aimer

Que cette aire de jeu se rappelle
Après moi le passé
Que cette aire de jeu est cruelle
Trois cents ans de liberté


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Gazette N°52 - 15 février 2008

Écoute le vent

La Gazette remercie « Moune » et Pierre Joubert de lui avoir confié plusieurs documents hérités de Clémentine. Après Le Vigneron publié dans un précédent numéro, voici un nouveau poème.

Écoute le vent qui court dans la plaine
Emportant au loin nos secrètes peines
Écoute le vent qui vient de la mer
Tout rempli de brume et de sel amer
Écoute le vent qui descend des monts
Et siffle en passant comme des démons
Chacun a son nom et tous ont une âme
Comme tout pays a son oriflamme
Le vent qui descend du nord le mistral
A l’impétueux élan du cheval
Celui qu’on appelle la tramontane
Est aussi sournois qu’un coup de pied d’âne
Quand au vent du sud le marin
Il sent la lavande et le romarin.

Clémentine Beauchamp
Petite histoire vécue [ par Brigitte Rochas ]

Mon ami ouvrit le tiroir de la commode de son épouse et en sortit un petit paquet enveloppé de soie. Ceci, dit-il, n’est pas un simple paquet, c’est de la lingerie. Il jeta le papier puis regarda la soie et la dentelle. « J’ai acheté ça la première fois que nous sommes allés à New York, il y a huit ans mais elle ne l’a jamais utilisé ; elle voulait le conserver pour une occasion spéciale. Eh bien, je crois que c’est le bon moment justement… ».

Il s’approcha du lit et rajouta ce paquet à d’autres choses que les pompes funèbres emmèneraient. Sa femme venait de mourir.
En se tournant vers moi, il me dit « Ne gardez rien pour une occasion spéciale. Chaque jour de la vie est une occasion spéciale. »
Je pense toujours à ses paroles, elles ont changé ma vie.

Aujourd’hui, je lis beaucoup plus qu’avant, je nettoie beaucoup moins. Je m’assieds sur ma terrasse et j’admire le paysage sans prêter attention aux mauvaises herbes du jardin. Je passe plus de temps avec ma famille et mes amis et moins de temps au travail. J’ai enfin compris que la vie est un ensemble d’expériences à apprécier.
... Désormais, je ne conserve rien.
J’utilise mes verres en cristal tous les jours, je mets ma veste neuve pour aller au supermarché si l’envie m’en prend. Je ne garde plus mon meilleur parfum pour les jours de fête, je l’utilise dès que j’en ai envie.
Les phrases du type « un jour » et « un de ces jours » sont bannies de mon vocabulaire. Si cela en vaut la peine, pour moi, je veux voir, entendre et faire les choses maintenant.
Je ne suis pas tout à fait sûre de ce qu’aurait fait la femme de mon ami si elle avait su qu’elle ne serait plus là demain, un demain que nous prenons tous trop à la légère.
Je crois qu’elle aurait appelé sa famille, ses amis intimes. Peut-être aurait-elle rappelé quelques vieux amis pour faire la paix ou s’excuser pour une vieille querelle passée ?
Je pense qu’elle serait allée manger chinois, sa cuisine préférée.

Ce sont toutes ces petites choses non faites qui m’énerveraient beaucoup si je savais que mes heures sont comptées !

Je serais contrariée de ne plus avoir vu certains de mes amis avec lesquels je devais reprendre contact un de ces jours…, contrariée de ne pas avoir écrit toutes les lettres que j’avais l’intention d’écrire, un de ces jours…, énervée de ne pas avoir dit assez souvent à mes proches combien je les aime.

Maintenant, je ne repousse rien, je ne retarde rien, je ne conserve rien ; je profite de toutes les petites choses qui peuvent apporter des rires et de la joie à la vie. Je me dis que chaque heure, chaque minute, chaque seconde est une occasion spéciale.


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Gazette N°72 - 29 septembre 2011

Découverte de la vendange

« Au creux des collines gazouille une belle rivière poissonneuse.
À flanc de coteau dansent les vignobles parfumés. Septembre grésille sous un soleil ardent tandis que le silence impalpable se rompt ci et là pour accueillir les claquements des sécateurs et les ronflements des tracteurs. Les vendanges rassemblent les couples espagnols, les ouvriers polonais, les pauvres bougres cherchant à glaner quatre sous et les jeunes gens forcés de payer leur loyer. Les grappes lourdes de sucre tombent dans les seaux. Les doigts gourds, le dos courbé et le gosier brûlant je comprends pourquoi la vigne est le meilleur symbole du travail des hommes et d'un salaire gagné à la sueur de leur front. Tandis que mes mains gardent la cadence j'imagine le nombre incalculable de bouteilles de vin qui sortiront des caves, garniront les tables -celles des particuliers et celles des restaurateurs. Je me promets de ne plus avaler une gorgée de ce nectar sans penser à ce que j'expérimente durant cette saison.

Comme pour toute chose, il y a la croyance d'une part et, l'expérience de l'autre. Tenez, je vois bien mes anciennes collègues, talons aiguilles et rouge aux lèvres, croire que faire les vendanges c'est bucolique, amusant, qu'on boit du matin au soir et que toutes les nuits on s'endort doucement ivres sur les tables ou encore que de jolies dames retroussent leurs jupes fleuries pour écraser sous leurs mignons petons les raisins divinement consentants. Voici comment la croyance brode des idées, façonne des images voire fabrique des dogmes qui peuvent être à dix mille lieues de la réalité présente. Venez et voyez vous-mêmes au cœur de la vigne ce qui s'y passe. [...] »

La suite de cette « plume de septembre » de Joëlle Dederix sur son site :
http://www.joelledederix.com/biblio-plume.html


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